10 mai 2009

Prix : les agriculteurs reprochent aux distributeurs un manque de transparence

Qui se gave le plus ? " C'est avec ce slogan que les Jeunes Agriculteurs devaient, jeudi 7 mai, mener des actions dans les magasins de la grande distribution pour dénoncer les marges dégagées par les enseignes. Ils comptaient fournir aux clients des tracts comparant les prix d'achat de leurs produits à ceux pratiqués dans les rayons.
Le syndicat veut aussi profiter de cette journée pour réclamer des résultats concrets de la part de l'Observatoire des prix et des marges, promis par le gouvernement voici plus d'un an, quand les prix alimentaires s'envolaient. Or celui-ci semble tourner au fiasco. Mercredi 6 mai, alors que le groupe de travail, censé faire la lumière sur la formation des prix dans le secteur du porc, devait se réunir pour la troisième fois, manquaient autour de la table la grande distribution et les abatteurs.
" Nous sommes préoccupés par leur absence. Ce sont les deux acteurs essentiels pour comprendre la formation des prix ", réagit Olivier Andrault, pour l'association de consommateurs UFC-Que choisir, qui commence, lui aussi, à s'impatienter. En janvier, l'organisme a publié un rapport dénonçant l'opacité de la formation des prix de la viande. " C'est une spécificité française ", insiste M. Andrault.
Les Jeunes Agriculteurs évoquent un manque de volonté politique : " Quand le gouvernement veut faire passer un message, il sait convoquer les banquiers ou l'industrie automobile, pourquoi pas les abatteurs ? ", interroge Mickaël Poillion, leur secrétaire général adjoint. Les éleveurs de porcs, eux, se disent déçus : " Tout le monde était favorable à l'observatoire. On pensait que les autres joueraient le jeu et fourniraient leurs données ", remarque Jacques Lemaître, qui les représente au comité de pilotage sur les marges.
Interrogée, la Fédération du commerce et de la distribution (FCD) a avancé un problème d'agenda. " Nous sommes pour la transparence ", défend Jérôme Bédier, son président. La FCD dit avoir " communiqué tous les éléments nécessaires " dans un dossier daté du 9 avril. Ledit dossier, qui tient en une page, détaille les charges et la rentabilité d'un rayon boucherie de distributeur, faisant état d'une marge de 1,6 %. Des chiffres qui ont surpris par leur manque de précision.
" LES ABATTEURS RÉTICENTS "
Les abatteurs évoquent eux aussi un manque de disponibilité. Dès la deuxième réunion, ils étaient absents. Les autres participants s'interrogent : renâclent-ils à livrer leurs marges ? Subissent-ils des pressions des distributeurs pour ne pas s'exécuter ? Redoutent-ils d'avoir à livrer des données confidentielles à la concurrence ? " Il nous faut les éléments pour avancer, signale-t-on à Bercy. Et visiblement, les abattoirs semblent réticents. "
Les représentants des producteurs et des consommateurs espèrent que tout le monde va revenir autour de la table et fournir des données précises. Mais la lenteur de l'avancée du dossier les exaspère. Surtout qu'après le porc, il faudra s'atteler à d'autres produits de base : le lait et les fruits et légumes.
Bercy compte boucler les travaux avant l'été. " Quand on sifflera la fin de la partie, si nous n'avons pas toutes les données, nous dénoncerons ceux qui n'ont pas joué le jeu ", prévient-on au ministère. Le sujet est suffisamment sensible dans l'opinion publique pour inquiéter le gouvernement. Pour preuve, Michel Barnier, qui comptait quitter le ministère de l'agriculture pour se consacrer à la campagne des européennes, a été prié, notamment à cause de ce dossier, de décaler son départ.

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