18 mars 2010

Des millions de camemberts de plastique dans l’eau

C’est une pollution d’un nouveau genre, que les associations environnementales dénoncent ces derniers mois... en vain. De petits camemberts en plastique pullulent dans les cours d’eaux et sur nos littoraux. Il s’agit de média filtrants principalement utilisés dans les stations d’épuration.


Depuis quatre ans, la Surfrider foundation, association du littoral basée à Biarritz, ramasse sur les plages basques ces mystérieux petits cylindres de plastique vert, blanc ou noir, d’un centimètre de diamètre.
Elle a trouvé il y a deux ans qu’il s’agissait en fait de filtres utilisés pour le traitement des eaux usées. Les bactéries se fixent sur ces petits camemberts. L’eau est ainsi purifiée avant d’être rejetée dans le milieu... Aujourd’hui, ils sont utilisés en pisciculture, sur les bateaux de marine marchande, par des papeteries et principalement par les stations d’épuration. Mais ces morceaux de plastique ne sont pas censés se retrouver dans la nature.
Plus inquiétant, le réseau européen de Surfrider a recueilli des témoignages attestant de la présence de ces camemberts en Bretagne, en Vendée, jusqu’au Portugal... jusqu’à deux affaires ces derniers mois : en Galice, et dans la Seine en Ile-de-France. Deux stations d’épuration ont reconnu avoir laissé s’échapper dans la nature ces camemberts. En Galice, 16 millions de ces cylindres sont partis à l’eau.
Un particulier pugnace
En France, Willy Goisbault, un jeune charpentier vivant sur une péniche à Villeneuve la Garenne a vu, début février, ces petits camemberts passer devant ses fenêtres.
a appelé la brigade fluviale et a décidé de remonter la Seine afin de trouver leur provenance. Par sa pugnacité, il a fait admettre leurs torts aux responsables du Siarce, le Syndicat intercommunal d’assainissement et de restauration du cours d’eau, qui gère la station d’épuration d’Evry. Un accident s’est produit dans la nuit du 11 au 12 février. Un bassin a débordé, lâchant dans la nature plusieurs centaines de m3 de ces cylindres.
Trois enquêtes sont en cours pour comprendre ce qui s’est passé. Willy Goisbault, en tant que particulier, ne pouvait pas porter plainte. L’association Robin des bois a donc décidé de le faire. Des pièges flottants ont été installés pour récupérer en partie les plastiques. Mais un mois après l’accident, des milliers de ces cylindres étaient toujours échoués sur les berges de la Seine, à quelques mètres de la station.
Un problème banalisé.
Pour les responsables de la Surfrider foundation, les accidents n’expliquent pas l’ampleur du phénomène et sa durée dans le temps. Ils cherchent encore à comprendre tous les usages de ces camemberts et leur provenance. Ils ont décidé de lancer un appel à témoins aussi en Amérique du Nord, du Sud et au Japon afin de voir si le phénomène est mondial.
Ces petits camemberts de plastique se fondent dans les déchets des littoraux. Erodés par le sel, les UV et l’eau, ils se fractionnent, sont mangés par les poissons et ainsi intègrent la chaîne alimentaire. Selon l’association, les déchets ne sont pas considérés au sens légal comme une pollution, pourtant ils sont tout aussi néfastes que des hydrocarbures sur nos côtes.
Une directive européenne sur le bon état écologique du milieu aquatique, examinée par le Parlement européen au mois d’avril, pourrait faire évoluer les choses.


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