A la veille d’un scrutin régional à très hauts risques pour son camp, Nicolas Sarkozy semble temporiser sur la taxe carbone, largement considérée à droite comme un impôt supplémentaire, en écartant l’idée de l’appliquer avant son instauration aux frontières de l’Europe.
Officiellement, l’objectif n’a pas varié. Comme l’a répété récemment le ministre de l’Ecologie Jean-Louis Borloo, la nouvelle version de la «contribution climat énergie» retoquée par le Conseil constitutionnel fin décembre entrera en vigueur au 1er juillet.
Mais l’entretien accordé vendredi par le chef de l’Etat au Figaro Magazine, ajouté aux déclarations de ténors de l’UMP, laisse au moins présager un changement de calendrier sur cette mesure emblématique dont il avait lui-même comparé l’importance à l’abolition de la peine de mort. «Je dis très clairement que la France montrera l’exemple, que nous voulons tenir nos engagements de limitation des émissions de gaz à effet de serre, mais que nous voulons dans le même temps une taxe carbone aux frontières de l’Europe», a déclaré Nicolas Sarkozy.
«Le temps de la concertation»
«Nous n’imposerons pas à nos industriels des contraintes si, dans le même temps, on autorise les importations venant de pays qui ne respectent aucune des règles environnementales à inonder nos marchés», a-t-il précisé. Et de promettre qu’il prendrait «le temps de la concertation, au niveau européen comme au niveau national». La déclaration du Président, qui n’avait jamais jusqu’alors lié l’entrée en vigueur de la taxe carbone tricolore à l’adoption d’un dispositif équivalent dans l’Union européenne, intervient alors que la fronde suscitée par cette mesure dans sa propre majorité semble reprendre de la vigueur.
Avant l’adoption de la première mouture, de nombreux élus UMP avaient déjà dénoncé ce «nouvel impôt». Alors que Jean-Louis Borloo concède sa «grande difficulté» à préparer un système «qui ne pénalise pas les entreprises» et que la France reste seule à en exiger un autre en Europe, Gérard Longuet a remis les pieds dans le plat. «Il est peut-être intéressant de se poser la question +est-ce une priorité?+ quand on sait que c’est une taxe qui va fonctionner pour deux ans et demi, jusqu’à 2013, et dont la dimension européenne s’éloigne à cet instant», a estimé mercredi le chef de file des sénateurs UMP.
«Trop de Grenelle tuerait le Grenelle»
Son collègue, Jean-Pierre Raffarin, lui a emboîté le pas vendredi en jugeant que cette taxe «pose problème (...) parce qu’au fond elle n’est pas applicable à court terme en Europe». Au nom de la «sagesse», l’ex-Premier ministre a, à son tour, proposé qu’une «action européenne» soit «un préalable à l’action française en matière de taxe carbone». Avant d’ajouter qu’en matière de protection de l’environnement, «trop de Grenelle tuerait le Grenelle».
Une semaine après la sortie du Président suggérant un bémol aux exigences environnementales imposées aux agriculteurs, il n’en fallait pas plus pour que la gauche crie au «reniement», comme l’a relevé la première secrétaire du PS Martine Aubry.
(Source AFP)
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