Dans son rapport annuel publié mardi 9 février, la Cour des comptes affirme que la hausse historique du déficit de la France n'est pas due uniquement à la crise mais aussi à la gestion du gouvernement, qui n'a pas maîtrisé suffisamment les dépenses pour compenser les baisses d'impôts. Ce rapport, finalisé en décembre quelques semaines avant le décès de Philippe Séguin, est "le dernier acte public qu'il aura marqué de son empreinte", a souligné le premier président par intérim de la cour, Alain Pichon.
Il faudra augmenter les impôtsAinsi, la Cour avertit que les réformes et les règles budgétaires ne suffiront pas. "La dégradation des comptes, notamment dans le domaine social, est telle qu'il faudra aussi augmenter le produit des prélèvements", et donc les impôts, souligne également le rapport. Nicolas Sarkozy a pourtant expliqué à de nombreuses reprises qu'il ne souhaite pas recourir à cette solution.La chute des recettes de l'Etat due à la crise est bien "la principale cause" de l'explosion du déficit public, passé de 3,4% du produit intérieur brut (PIB) fin 2008 à 7,9% fin 2009, explique la Cour. Selon ses calculs, la croissance des dépenses, hors plan de relance, et les baisses de prélèvements obligatoires sont responsables à hauteur d'environ 0,6% de cette "dégradation structurelle" du déficit en un an. Le ministère de l'Economie dément ce calcul et affirme en réponse à la Cour que "la dégradation du déficit public en 2009 est entièrement imputable à la crise".
"Niches fiscales"Le rapport explique de son côté que le déficit structurel est pourtant bien le résultat d'un "surcroît de dépenses non imputables" au plan de relance de l'économie et du non-respect par le gouvernement de ses engagements en matière d'encadrement des "niches fiscales". Le gouvernement avait promis que chaque nouvelle "niche" (dérogation fiscale synonyme de manque à gagner pour l'Etat) serait gagée par la suppression d'une dépense d'un montant équivalent.Or, d'après la Cour des comptes, le coût des nouvelles niches l'an dernier est supérieur de 1,2 milliard d'euros aux gains obtenus dans le même temps par ces suppressions.Si l'on ajoute l'augmentation du coût de la myriade de niches déjà existantes, le manque à gagner pour l'Etat passerait ainsi de 65,9 milliards d'euros à 70,7 milliards en 2009, soit une hausse de 7,3% (hors dérogations fiscales incluses dans le plan de relance).Le rapport souligne en outre, qu'un certain nombre de ces "niches" ne sont plus inscrites dans les budgets depuis 2006 alors qu'"elles existent encore, atteignent 80 milliards d'euros et sont probablement en augmentation". Si ces dispositifs avaient été maintenus dans la liste, leur coût total aurait atteint 146 milliards d'euros en 2008.
Incapacité de l'Etat à préserver ses recettesPlus généralement, le rapport condamne l'incapacité de l'Etat à préserver ses recettes, quand il baisse certains impôts sans contrepartie. Et de citer en exemple le taux de TVA réduit accordé à la restauration, qui représente trois milliards de pertes par an. Au total, les recettes fiscales nettes de l'Etat diminueront d'environ six milliards d'euros en 2009 et de deux milliards de plus en 2010, hors réforme de la taxe professionnelle et hors plan de relance, note la Cour des comptes.D'où "un emballement du déficit et de la dette au-delà de tous les repères" avec des "marges de manœuvre pour affronter d'éventuelles nouvelles crises considérablement amoindries". Et "la nécessité de mesures structurelles" de grande ampleur pour redresser les finances publiques.Si la Révision générale des politiques publiques (RGPP) lancée par le gouvernement pour réduire les dépenses de fonctionnement "est une démarche ambitieuse", elle n'aboutit "au plan budgétaire qu'à des résultats modestes", rappelle le rapport.
Le ministère de la Culture épingléEt la Cour des comptes ne s'arrête pas à la politique budgétaire du gouvernement. Elle estime que le ministère de la Culture n'aurait pas dû verser une indemnité de 300 euros au titre du droit droit d'auteur aux héritiers de l'architecte du bâtiment abritant ses services à Paris et recouvert d'une résille métallique lors d'une réhabilitation en 2004.Les petits-fils de l'architecte Georges Vaudoyer, qui avait conçu l'édifice dit des Bons-Enfants en 1924, avaient déposé une requête devant le tribunal administratif de Paris en 2005, estimant que cette résille "constituait une atteinte au droit moral de leur grand-père", indique le rapport.En mai 2007, le tribunal avait reconnu l'atteinte illégale et "condamné l'Etat au paiement d'un euro symbolique". Malgré cette décision, et "afin d'éteindre tout risque de poursuite du contentieux", souligne la Cour, le ministère avait préféré conclure une transaction avec les héritiers.Selon la Cour, le versement de cette indemnité "suscite les plus expresses réserves car, en l'absence d'une dette établie par une décision de justice ou par un texte applicable d'évidence (...), il pourrait être considéré comme une libéralité". Dans sa réponse, Frédéric Mitterrand souligne que le risque d'une condamnation à déposer la résille "était bien réel" et que celle-ci aurait eu pour l'administration "des conséquences financières importantes" et "sur le plan politique, des conséquences lourdes en terme d'image".Conçue par l'architecte Francis Soler, la résille métallique est destinée à unifier deux bâtiments où sont installés les bureaux du ministère.
"Dérapages temporels" et "dérives financières"La Cour des comptes dissèque également le dossier de l'avion de transport militaire A400M, victime de surcoûts et de retards, dans un chapitre consacré aux "dérapages temporels" et "dérives financières" des programmes d'armement. Evoquant les "travaux préparatoires" de l'Airbus militaire, le rapport relève que dans les années 1990, "une phase préliminaire d'un coût de 84 millions d'euros, demandée par l'industrie, fut refusée par les Etats clients". Elle aurait pourtant permis "d'atténuer les difficultés considérables" rencontrées depuis.L'A400M fait l'objet d'une âpre négociation entre l'industriel EADS et les sept Etats partenaires du projet, sur la répartition de plus de cinq milliards d'euros de surcoût.La Cour souligne "le niveau trop ambitieux des performances" exigées, certaines se révélant "irréalisables par l'industriel maître d'œuvre".Acheter des avions de "pays tiers", donc américains, "aurait permis de doter plus rapidement les forces françaises des moyens de projection qui leur font défaut et n'aurait sans doute pas été plus onéreux", assure le rapport.La formule du "contrat global liant le développement et la fourniture d'avions" s'est révélée "source de difficultés considérables". Idem pour les indemnités de retard "plafonnées" qui ont eu pour conséquence, selon la Cour, "l'affaiblissement" de l'agence européenne chargée de la conduite du projet face aux industriels.Le rapport dénonce des problèmes similaires sur d'autres programmes, comme le Rafale ou les hélicoptères de transport NH90 et d'attaque Tigre.Elle "prend acte" cependant des "réformes très récentes de gouvernance des programmes" engagées par le ministère de la Défense.(Nouvelobs.com avec AFP)
Il faudra augmenter les impôtsAinsi, la Cour avertit que les réformes et les règles budgétaires ne suffiront pas. "La dégradation des comptes, notamment dans le domaine social, est telle qu'il faudra aussi augmenter le produit des prélèvements", et donc les impôts, souligne également le rapport. Nicolas Sarkozy a pourtant expliqué à de nombreuses reprises qu'il ne souhaite pas recourir à cette solution.La chute des recettes de l'Etat due à la crise est bien "la principale cause" de l'explosion du déficit public, passé de 3,4% du produit intérieur brut (PIB) fin 2008 à 7,9% fin 2009, explique la Cour. Selon ses calculs, la croissance des dépenses, hors plan de relance, et les baisses de prélèvements obligatoires sont responsables à hauteur d'environ 0,6% de cette "dégradation structurelle" du déficit en un an. Le ministère de l'Economie dément ce calcul et affirme en réponse à la Cour que "la dégradation du déficit public en 2009 est entièrement imputable à la crise".
"Niches fiscales"Le rapport explique de son côté que le déficit structurel est pourtant bien le résultat d'un "surcroît de dépenses non imputables" au plan de relance de l'économie et du non-respect par le gouvernement de ses engagements en matière d'encadrement des "niches fiscales". Le gouvernement avait promis que chaque nouvelle "niche" (dérogation fiscale synonyme de manque à gagner pour l'Etat) serait gagée par la suppression d'une dépense d'un montant équivalent.Or, d'après la Cour des comptes, le coût des nouvelles niches l'an dernier est supérieur de 1,2 milliard d'euros aux gains obtenus dans le même temps par ces suppressions.Si l'on ajoute l'augmentation du coût de la myriade de niches déjà existantes, le manque à gagner pour l'Etat passerait ainsi de 65,9 milliards d'euros à 70,7 milliards en 2009, soit une hausse de 7,3% (hors dérogations fiscales incluses dans le plan de relance).Le rapport souligne en outre, qu'un certain nombre de ces "niches" ne sont plus inscrites dans les budgets depuis 2006 alors qu'"elles existent encore, atteignent 80 milliards d'euros et sont probablement en augmentation". Si ces dispositifs avaient été maintenus dans la liste, leur coût total aurait atteint 146 milliards d'euros en 2008.
Incapacité de l'Etat à préserver ses recettesPlus généralement, le rapport condamne l'incapacité de l'Etat à préserver ses recettes, quand il baisse certains impôts sans contrepartie. Et de citer en exemple le taux de TVA réduit accordé à la restauration, qui représente trois milliards de pertes par an. Au total, les recettes fiscales nettes de l'Etat diminueront d'environ six milliards d'euros en 2009 et de deux milliards de plus en 2010, hors réforme de la taxe professionnelle et hors plan de relance, note la Cour des comptes.D'où "un emballement du déficit et de la dette au-delà de tous les repères" avec des "marges de manœuvre pour affronter d'éventuelles nouvelles crises considérablement amoindries". Et "la nécessité de mesures structurelles" de grande ampleur pour redresser les finances publiques.Si la Révision générale des politiques publiques (RGPP) lancée par le gouvernement pour réduire les dépenses de fonctionnement "est une démarche ambitieuse", elle n'aboutit "au plan budgétaire qu'à des résultats modestes", rappelle le rapport.
Le ministère de la Culture épingléEt la Cour des comptes ne s'arrête pas à la politique budgétaire du gouvernement. Elle estime que le ministère de la Culture n'aurait pas dû verser une indemnité de 300 euros au titre du droit droit d'auteur aux héritiers de l'architecte du bâtiment abritant ses services à Paris et recouvert d'une résille métallique lors d'une réhabilitation en 2004.Les petits-fils de l'architecte Georges Vaudoyer, qui avait conçu l'édifice dit des Bons-Enfants en 1924, avaient déposé une requête devant le tribunal administratif de Paris en 2005, estimant que cette résille "constituait une atteinte au droit moral de leur grand-père", indique le rapport.En mai 2007, le tribunal avait reconnu l'atteinte illégale et "condamné l'Etat au paiement d'un euro symbolique". Malgré cette décision, et "afin d'éteindre tout risque de poursuite du contentieux", souligne la Cour, le ministère avait préféré conclure une transaction avec les héritiers.Selon la Cour, le versement de cette indemnité "suscite les plus expresses réserves car, en l'absence d'une dette établie par une décision de justice ou par un texte applicable d'évidence (...), il pourrait être considéré comme une libéralité". Dans sa réponse, Frédéric Mitterrand souligne que le risque d'une condamnation à déposer la résille "était bien réel" et que celle-ci aurait eu pour l'administration "des conséquences financières importantes" et "sur le plan politique, des conséquences lourdes en terme d'image".Conçue par l'architecte Francis Soler, la résille métallique est destinée à unifier deux bâtiments où sont installés les bureaux du ministère.
"Dérapages temporels" et "dérives financières"La Cour des comptes dissèque également le dossier de l'avion de transport militaire A400M, victime de surcoûts et de retards, dans un chapitre consacré aux "dérapages temporels" et "dérives financières" des programmes d'armement. Evoquant les "travaux préparatoires" de l'Airbus militaire, le rapport relève que dans les années 1990, "une phase préliminaire d'un coût de 84 millions d'euros, demandée par l'industrie, fut refusée par les Etats clients". Elle aurait pourtant permis "d'atténuer les difficultés considérables" rencontrées depuis.L'A400M fait l'objet d'une âpre négociation entre l'industriel EADS et les sept Etats partenaires du projet, sur la répartition de plus de cinq milliards d'euros de surcoût.La Cour souligne "le niveau trop ambitieux des performances" exigées, certaines se révélant "irréalisables par l'industriel maître d'œuvre".Acheter des avions de "pays tiers", donc américains, "aurait permis de doter plus rapidement les forces françaises des moyens de projection qui leur font défaut et n'aurait sans doute pas été plus onéreux", assure le rapport.La formule du "contrat global liant le développement et la fourniture d'avions" s'est révélée "source de difficultés considérables". Idem pour les indemnités de retard "plafonnées" qui ont eu pour conséquence, selon la Cour, "l'affaiblissement" de l'agence européenne chargée de la conduite du projet face aux industriels.Le rapport dénonce des problèmes similaires sur d'autres programmes, comme le Rafale ou les hélicoptères de transport NH90 et d'attaque Tigre.Elle "prend acte" cependant des "réformes très récentes de gouvernance des programmes" engagées par le ministère de la Défense.(Nouvelobs.com avec AFP)
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