16 avril 2010

La «niche Copé», un boulet à 22 milliards

C’est la grosse niche qui fait tache pour un gouvernement attaqué, y compris par son propre camp, sur le thème de l’injustice fiscale. Surnommée «niche Copé» - ministre du Budget en 2004 qui la fit voter à la va-vite -, elle exonère d’impôt sur les sociétés (33,3%) les plus-values encaissées par des personnes physiques ou morales (holdings) en cas de vente de leurs filiales ou titres de participation détenus depuis plus de deux ans. Un dispositif «d’attractivité fiscale», qui visait à aligner la France sur le régime plus favorable de ses voisins (Pays-Bas, Belgique, Allemagne).

Sauf que son coût «extrêmement raisonnable» - promettait alors Copé -, estimé à moins d’un milliard d’euros à compter de 2008, s’est avéré énorme pour le contribuable. Selon la prévision, classée «très fiable», de l’administration, elle a représenté un manque à gagner de 3,4 milliards d’euros en 2007, 12,5 milliards en 2008 et 6,1 milliards en 2009. Soit un total de 22 milliards d’euros sur trois ans. Ce «raté» prévisionnel a contraint Bercy à justifier cette superniche pas très en phase avec la campagne de «dénichification» lancée par Matignon. Dans l’entourage de Christine Lagarde, on souligne que ce manque à gagner «théorique» est à des années-lumière des recettes qu’aurait perçues l’Etat en l’absence de cette exonération. «Certains se sont dépêchés d’en profiter et de solder certaines opérations de peur qu’elle ne disparaisse», explique-t-on. Autre argument avancé, elle concernerait avant tout les sociétés familiales et les PME et non les «gros poissons» qui ont organisé leur optimisation fiscale à l’étranger depuis belle lurette. Bref, une mesure peu coûteuse, dont l’arrivée a coïncidé avec une augmentation de 14,7% des holdings en France depuis trois ans.
Mais voilà. La vision ne résiste guère à l’examen des ventes réalisées ces dernières années : des cadors comme Suez, Danone ou le fonds PAI Partners ont usé du dispositif pour réaliser d’importantes cessions. Contacté par Libération, Jérôme Cahuzac, président (PS) de la commission des finances de l’Assemblée, demande«un réexamen de cette niche pour laquelle le gouvernement est incapable, comme pour le bouclier fiscal, mais pour un coût bien plus important, de prouver l’efficacité». Etrangement, le gouvernement s’est abstenu d’estimer son coût en 2010.
liberation.fr

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